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Le recours direct en interprétation, un recours subsidiaire ?

Public - Droit public général
17/12/2019
Dans un arrêt de section rendu le 6 décembre, le Conseil d’État déclare qu’un recours direct en interprétation est irrecevable si l’acte à interpréter fait l’objet d’une autre instance. C’est en effet à la juridiction administrative saisie au fond qu’il revient d’interpréter l’acte litigieux.
Alors qu’il faisait l’objet d’un recours devant la chambre disciplinaire de première instance des chirurgiens-dentistes, un dentiste avait demandé l’interprétation d’un arrêté au tribunal administratif de Besançon, qui avait transmis le recours au Conseil d’État, en application de l’article R. 351-2 du code de justice administrative.
 
Saisi du recours en interprétation, le Conseil, dans un arrêt de section rendu le 6 décembre 2019 (CE, sect., 6 déc. 2019, n° 416762) commence par rappeler que « la recevabilité d’un recours direct en interprétation d’un acte administratif est subordonnée à l’existence d’un différend né et actuel susceptible de relever de la compétence du juge administratif, dont la résolution est subordonnée à l’interprétation demandée ».
 
Irrecevabilité du recours en interprétation postérieur 

Le différend doit simplement être « susceptible de relever de la compétence du juge administratif » mais ne doit pas faire l’objet d’un recours devant une juridiction administrative.
 
En effet, la Haute cour vient préciser dans son arrêt : « toutefois, l’auteur d’un tel recours ne peut invoquer à cette fin un différend porté devant une juridiction administrative, à laquelle il revient de procéder elle-même à l’interprétation des actes administratifs dont dépend la solution du litige qui lui est soumis ». Ainsi, la personne faisant l’objet d’un recours ne peut exercer un recours en interprétation après l’introduction du premier recours à son encontre.
 
Il existerait en effet en pareil cas un risque d’interprétation différente entre les deux juridictions, alors que l’une des deux est saisie du litige, et doit donc interpréter l’acte dans le cadre de ce recours.
 
Non-lieu à statuer sur un recours en interprétation antérieur 
 
Le Conseil d’État annonce également la conduite à tenir lorsqu’un recours direct en interprétation a été introduit, et qu’un recours portant sur l’acte à interpréter est introduit postérieurement. Dans une telle hypothèse, annonce la Haute cour, « si le différend est porté devant une juridiction administrative après l’introduction du recours en interprétation, celui-ci perd son objet, de sorte qu’il n’y a plus lieu d’y statuer ».
 
Ici, encore une fois, c’est bien à la juridiction administrative saisie d’un recours qu’il revient d’interpréter l’acte litigieux. En écartant le recours direct en interprétation, qu’il soit antérieur ou postérieur à une autre instance portant sur le même acte, le Conseil d’État en fait une procédure subsidiaire, recevable uniquement en l’absence d’un autre recours.
 
En l’espèce, le requérant faisait l’objet d’une action à son encontre devant la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance de Franche-Comté de l’ordre des chirurgiens-dentistes au moment où il a décidé d’introduire un recours direct en interprétation. Ce recours visait en effet à obtenir une interprétation en sa faveur face à des craintes d’interprétation défavorable par la chambre disciplinaire. Au regard des règles édictées, la Haute cour déclare l’irrecevabilité du recours en interprétation.
 
Le Conseil d’État avait, dans un arrêt de 2018, déclaré que le recours direct en interprétation était irrecevable lorsqu’une juridiction avait déjà statué sur le sens de l’acte à l’occasion d’une instance (CE, 14 févr. 2018, n° 416294).
 
Pour en savoir plus sur le recours direct en interprétation, v. Le Lamy droit public des affaires 2019, n° 5031.
Source : Actualités du droit