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Maladie professionnelle : l’intention de nuire de l’employeur n’est pas une condition nécessaire !

Public - Droit public général
15/03/2019
Dans un arrêt du 13 mars, le Conseil d’État rappelle qu’une maladie peut être qualifiée de professionnelle si elle présente un lien direct avec l’exercice des fonctions, et déclare qu’elle peut être caractérisée même en l’absence de volonté délibérée de l’employeur de nuire à l’agent.
Une attachée territoriale atteinte d’un syndrome dépressif avait saisi le tribunal administratif de Nantes d’une demande d’annulation de la décision du président de la communauté d’agglomération refusant de reconnaître l’origine professionnelle de sa maladie. Les juges de première instance ont finalement jugé la maladie imputable au service. Le jugement a ensuite été annulé par les juges d’appel.
 
Dans son arrêt, le Conseil d’État rappelle la définition de la maladie professionnelle en indiquant qu’ « une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l’exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause ». Il pose toutefois une exception, à savoir si « un fait personnel de l’agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l’aggravation de la maladie du service ».
 
En l’espèce, il relève que la fonctionnaire avait fait l’objet de sanctions d’exclusion temporaire et avait ensuite « souffert d’un syndrome dépressif sévère, constaté (…) par un médecin ».
 
La Cour administrative d’appel a cependant jugé que la fonctionnaire était « à l’origine de l’épuisement professionnel et des conditions de travail dégradées dont elle se plaignait », et donc au moins en partie responsable de son état dépressif. Les juges d’appel ont également considéré que l’absence de volonté délibéré de l’employeur « de porte atteinte à ses droits, à sa dignité ou d’altérer sa santé » excluait la qualification de maladie professionnelle.
 
La Haute cour déclare toutefois « qu’il appartient au juge d’apprécier si les conditions de travail du fonctionnaire peuvent, même en l’absence de volonté délibérée de nuire à l’agent, être regardées comme étant directement à l’origine de la maladie dont la reconnaissance comme maladie professionnelle est demandée ».
 
Ainsi, l’intention de nuire de l’employeur n’est pas une condition nécessaire à la qualification de maladie professionnelle. Une telle condition serait de nature à restreindre largement la qualification de professionnelle de la maladie, notamment car la volonté délibérée de nuire serait très difficile à démontrer pour l’agent.
 
Le Conseil d’État, après avoir annulé l’arrêt d’appel, renvoie l’affaire aux juges du fond, qui auront à déterminer s’il existe un lien entre les conditions de travail et la maladie de la requérante.
 

Pour en savoir plus sur la qualification de maladie professionnelle, v. Le Lamy fonction publique territoriale n° 807-118.

Sur la qualification de maladie professionnelle par la Cour de cassation, v. notamment notre actualité du 6 décembre 2017.


 
Source : Actualités du droit