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Créance entre époux séparés de biens : comment évaluer la créance résultant du paiement de la dette personnelle d'un époux par un apport de fonds non exclusivement propres à son conjoint ?

Civil - Personnes et famille/patrimoine
25/01/2017
L'évaluation des créances entre époux séparés de biens selon la règle dite du valorisme (par application des dispositions combinées des articles 1543 et 1479, alinéa 2 du Code civil, ce dernier renvoyant à l'article 1469, alinéa 3, du même code, propre au régime de communauté) constitue une exception dérogeant à la règle du nominalisme s'appliquant entre étrangers et ne peut concerner qu'un apport de fonds propres dûment identifié du conjoint ; aussi, pour l'évaluation d'une créance née du paiement de la dette personnelle d'un époux par un apport de fonds provenant de la vente d'un bien indivis entre l'épouse de ce dernier et la mère de celle-ci, le profit subsistant doit être déterminé selon la proportion dans laquelle les fonds apportés par l'épouse, à l'exclusion de ceux éventuellement apportés par la mère de celle-ci, ont contribué au paiement de la soulte ayant permis l'attribution du bien en cause. Telle est la solution qui se dégage d'un arrêt rendu le 18 janvier 2017.
 
En l'espèce, M. X était décédé le 2 juillet 2006, laissant pour lui succéder son épouse, séparée de biens, Mme Y, leur fils, José, et trois enfants issus d'une première union, Renée, Paul et Raoul. Ces derniers avaient assigné Mme Y et son fils en partage. Raoul X étant décédé en cours d'instance, ses trois enfants, Olivier, Valérie et Béatrice, étaient intervenus volontairement.
 
Pour fixer la créance de Mme X à l'égard de l'indivision, au titre d'une soulte de 26 000 francs payée par Paul X à ses frères et soeurs aux termes d'une donation-partage du 12 février 1958 lui attribuant un terrain, la cour d'appel de Pau avait retenu que la somme avait été payée au moyen de fonds provenant de la vente d'un bien indivis entre Mme X et sa mère et que l'emploi par Paul X de cette somme, afin de payer une dette personnelle, l'avait rendu débiteur à l'égard de son épouse à hauteur du profit qu'il en avait retiré, indépendamment des rapports ayant pu exister entre celle-ci et sa mère quant à la répartition définitive entre elles du prix de vente de leur immeuble (CA Pau, 9 novembre 2015, n° 13/00989).
 
A tort, selon la Cour suprême, qui relève que le profit subsistant devait être déterminé selon la proportion dans laquelle les fonds apportés par l'épouse, à l'exclusion de ceux éventuellement apportés par la mère de celle-ci, avaient contribué au paiement de la soulte ayant permis l'attribution du terrain.

Par Anne-Lise Lonné-Clément

 
Source : Actualités du droit