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Le congé de maladie n’interdit pas l’adoption d’une sanction avec privation de rémunération

Public - Droit public général
20/07/2023
Dans un arrêt du 3 juillet 2023, le Conseil d’État a rappelé que le fait pour un fonctionnaire d’être en congé de maladie ne faisait pas obstacle à l’adoption d’une sanction disciplinaire, et annoncé qu'en cas d’exclusion avec privation de rémunération, la sanction pouvait prendre effet immédiatement, sans attendre la fin du congé.
Dans cette affaire une sanction d'exclusion de fonctions avait été adoptée à l'égard d'un professeur qui était en congé de maladie. Quelques mois après, l’agent avait reçu un titre de perception portant recouvrement d’un trop perçu pour une somme reçue durant son congé de maladie. Une décision de suspension de sa rémunération avec effet rétroactif avait ensuite été adoptée. L'agent contestait la privation de rémunération durant son congé maladie.
 
Privation de rémunération pendant un congé de maladie
 
Sur la question de la possibilité de priver un agent en situation de congé maladie de sa rémunération, le Conseil d'Etat, dans sa décision du 3 juillet 2023 publiée aux tables du Recueil (CE, 3 juill. 2023, n° 459472, Lebon T.), annonce que trois principes sont à concilier :
  • d’une part, l’ancien article 20 du Titre I du statut général prévoit la règle de la rémunération après service fait, désormais codifiée l’article L. 115-1 du Code général de la fonction publique (CGFP) ;
  • d’autre part, l’ancien article 34, 2°, du statut de la fonction publique de l’État, désormais codifié à l’article L. 822-3 du CGFP, prévoit un droit pour le fonctionnaire en activité à des congés de maladie rémunérés. Il est précisé que le fonctionnaire « conserve alors l’intégralité de son traitement (…) » ;
  • enfin, l’ancien article 66 du même statut des agents de l’État, codifié à l’article L. 533-3 du CGFP, qui fixe les différentes sanctions, prévoit la possibilité de sanctions avec privation de traitement. Il est indiqué que « l’exclusion temporaire de fonctions (…) est privative de toute rémunération ». Il s’agissait donc pour le Conseil d’État de concilier ces trois dispositions.
 
Une exclusion temporaire de fonctions de 16 jours à deux ans, sanction du 3ème groupe, entraîne une privation de rémunération pour le fonctionnaire. Sur ce point, voir Le Lamy fonction publique, n° 1625.

Des procédures distinctes et indépendantes
 
La Haute cour répond dans une décision du 3 juillet à mentionner aux tables du Recueil (CE, 3 juill. 2023, n° 459472, Lebon T.), que « la procédure disciplinaire et la procédure de mise en congé de maladie sont des procédures distinctes et indépendantes, et la circonstance qu'un agent soit placé en congé de maladie ne fait pas obstacle à l'exercice de l'action disciplinaire à son égard ni, le cas échéant, à l'entrée en vigueur d'une décision de sanction ».
 
Une action disciplinaire peut donc parfaitement être engagée durant le congé de maladie d’un agent, et une sanction peut être adoptée et entrer en vigueur avant la fin de ce congé.
 
La Haute cour ajoute que le maintien de la rémunération durant le congé de maladie a « pour seul objet de compenser la perte de rémunération due à la maladie en apportant une dérogation au principe (…) subordonnant le droit au traitement au service fait » (sur la règle traitement après service fait, voir Le Lamy fonction publique, n° 1384).

La rémunération du congé de maladie constituant une dérogation, il est possible de ne pas rémunérer l’agent pendant son congé de maladie en cas de sanction. En effet, si l’agent n’avait pas été en congé de maladie, la sanction aurait entrainé une absence de rémunération. La même règle doit donc s’appliquer pendant le congé. La Haute cour annonce ainsi que les dispositions précitées « ne peuvent avoir pour effet d'accorder à un fonctionnaire bénéficiant d'un congé de maladie des droits à rémunération supérieurs à ceux qu'il aurait eus s'il n'en avait pas bénéficié. Un agent faisant l'objet d'une exclusion temporaire de fonctions étant privé de rémunération pendant la durée de cette exclusion, il ne saurait, pendant cette période, bénéficier d'un maintien de sa rémunération à raison de son placement en congé de maladie ».

Par conséquent, le Conseil d’État confirme la décision infligeant à l’agent la sanction disciplinaire d’exclusion des fonctions durant deux ans ainsi que la suspension de rémunération ayant démarré durant le congé de maladie.
À propos de la suspension de traitement pour les agents soumis à l’obligation vaccinale et n’y ayant pas satisfait, le Conseil avait annoncé qu’un agent en congé de maladie pouvait faire l'objet d'une sanction de suspension de traitement pour refus de vaccination. Toutefois, à l’inverse de la décision du 3 juillet dernier, il avait considéré que la suspension de traitement ne devait prendre effet qu'à compter de la date de la fin du congé maladie (CE, 2 mars 2022, nº 458353, Lebon T.).
Source : Actualités du droit