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Du jugement du mineur

Pénal - Procédure pénale, Droit pénal général
05/07/2019
Le jugement des mineurs nécessite des dispositions particulières concernant notamment le déroulement des débats, la publicité, la procédure et les voies de recours offertes.
Dispositions générales relatives au jugement d’un mineur (Titre I) 
Concernant les débats, le chapitre 1er organise le déroulement des débats avec l’ordre des interventions (L. 511-1). Le projet prévoit aussi l’absence du mineur au cours de l’audience dans les cas suivants :
  • « Le juge des enfants, le président du tribunal pour enfants et le président du tribunal de police peuvent ordonner, à tout moment, que le mineur se retire pendant tout ou partie de la suite des débats » (L. 511-2) ;
  • « Le juge des enfants ou le président du tribunal pour enfants pourra, si l'intérêt du mineur l'exige, dispenser ce dernier de comparaître à l'audience. Dans ce cas, le mineur sera représenté par un avocat ou son représentant légaL. La décision sera réputée contradictoire » (L. 511-3).
Pour tout ce qui concerne l’action civile (Chapitre II), « les victimes sont avisées et les parties civiles sont citées selon les modalités prévues par les articles 391 et 420 du Code de procédure pénale. Toutefois, lorsqu'il a été statué sur l'action civile lors de l'audience d'examen de la culpabilité, la partie civile est simplement avisée par tout moyen de la date de l'audience sur la sanction » (L. 512-1). Des spécificités sont prévues à l’article L. 512-2 pour des cas où le mineur est impliqué dans la même cause qu’un ou plusieurs majeurs.
 
Et, dans un but de protection du mineur, la publicité des débats est restreinte. Le chapitre III prévoit que le juge des enfants doit tenir l’audience et statuer en chambre du conseil (L. 513-1). Concernant le tribunal de police, le tribunal pour enfants et la cour d’assises des mineurs, seuls « la victime, qu'elle soit ou non constituée partie civile, les témoins de l'affaire, les représentants légaux, les personnes civilement responsables et les proches parents du mineur, la personne ou le service auquel celui-ci est confié, les membres du barreau ainsi que les personnels des services désignés pour suivre le mineur » peuvent assister aux débats (L. 513-2).
 
Par dérogation, si le prévenu, mineur au moment des faits est devenu majeur, il peut demander à ce que l’audience soit publique, sous conditions (L. 513-3).
 
Au titre de l’article L. 513-4, la publication du compte rendu des débats est interdite, sauf si l’audience était publique mais l’anonymisation du mineur doit être respectée. « Le jugement ou l’arrêt rendu à l’encontre du mineur peut être publié, mais sans que les nom et prénom du mineur ne soient indiqués, même par une initiale ».
 
De la procédure de jugement – Elle est encadrée par le Titre II du projet de code de justice pénale des mineurs.
 
Le premier chapitre de ce titre organise le jugement devant le juge des enfants et le tribunal pour enfants.
Pour ce qui concerne les dispositions communes (Section 1), l’article L. 521-1 du projet prévoit le renvoi de l’affaire à une prochaine audience si le juge des enfants ou le tribunal estime qu’elle n’est pas en état d’être jugée, dans un délai ne pouvant excéder trois mois. Dans cette situation, l’autorité de jugement doit statuer sur le maintien de la mesure éducative judiciaire provisoire et de la mesure de sûreté. Si le mineur est en détention provisoire, le délai ne peut excéder un mois à partir du jour de la première comparution devant le tribunal.
 
Si le juge des enfants ou le tribunal spécialisé estime « que la complexité de l’affaire nécessite des investigations supplémentaires approfondies », il peut renvoyer le dossier au procureur de la République. Il devra statuer sur la prolongation des mesures de sûreté ou éducative ou statuer sur son maintien en détention (L. 521-3). « Le jugement est prononcé au plus tard dans un délai d’un mois après l’audience, sauf dans les affaires présentant une particulière complexité » précise l’article L. 521-4.
 
Pour la procédure de mise à l’épreuve éducative (section 2), « le juge des enfants ou le tribunal pour enfants saisi pour le jugement d’un mineur auquel est imputé un délit ou une contravention de la cinquième classe appliquent la procédure de mise à l’épreuve éducative » selon l’article L. 521-5. Exceptions prévues au sein du même article : lorsque la juridiction statue en audience unique.
 
L’article 521-6 précise que cette procédure de mise à l’épreuve éducative comporte :
  • une audience d’examen sur la culpabilité ;
  • une période de mise à l’épreuve éducative ;
  • une audience de prononcé de la sanction.
Pour Béatrice Voss du Conseil national des barreaux, « cette mise à l’épreuve éducative remplace le temps éducatif ».
 
Au titre de l’article L. 521-7, si le mineur est poursuivi « au cours de la période d’épreuve, pour un ou plusieurs nouveaux délits ou contraventions de la cinquième classe, le juge des enfants ou le tribunal pour enfants :
  • 1° Tient, dans chaque procédure, une audience d’examen de la culpabilité ;
  • 2° Modifie le cas échéant, d’office ou sur réquisitions du procureur de la République, les mesures d'investigation, éducative judiciaire provisoire et de sûreté dont le mineur fait l’objet afin de les adapter à son évolution ;
  • 3° Statue, au cours d’une même audience de prononcé de la sanction, sur l’ensemble des procédures dans lesquelles le mineur a été reconnu coupable au cours de la période d’épreuve ».
Concernant l’audience d’examen de la culpabilité (sous-section 2), l’article L. 521-8 du projet de Code dispose que « l'audience se déroule conformément aux dispositions du Code de procédure pénale. L’instruction à l’audience terminée, la partie civile est entendue en sa demande. Si le procureur de la République assiste à l’audience, il prend ses réquisitions. Le mineur et son avocat et, s’il y a lieu, les personnes civilement responsables, présentent leur défense. Le mineur ou son avocat a toujours la parole en dernier. La juridiction statue alors sur la culpabilité du mineur et, le cas échéant, sur l’action civile ».
 
L’article suivant prévoit que, s’il le faut, le juge des enfants, statuant en chambre du conseil, peut ordonner d’office ou à la demande du procureur de la République ou du mineur, le renvoi de l’affaire devant le tribunal pour enfants. Il devra en amont statuer sur le maintien de la mesure éducative judiciaire provisoire et la mesure de sûreté. Cette décision n’est pas susceptible de recours, dès lors qu’il s’agit d’une mesure d’administration judiciaire. Le délai de renvoi est compris entre 10 jours et deux mois.
 
« La juridiction qui déclare un mineur coupable des faits qui lui sont reprochés ordonne l’ouverture d’une période de mise à l’épreuve éducative d’une durée de six mois », dispose l’article L. 521-10. Si cette procédure est déjà prononcée pour d’autres faits, par principe la juridiction y rattachera la nouvelle procédure (L. 521-12). Et si une mise à l’épreuve éducative est ordonnée, la juridiction devra fixer lors de l’audience portant sur la culpabilité, la date de l’audience pour le prononcé de la sanction qui doit avoir lieu dans un délai de six mois (L. 521-13).
 
Ces délais sont critiqués par le syndicat de la magistrature, qui estime qu’ils « ne sont pas tenables au regard des effectifs (des magistrats, greffiers ou encore des éducateurs) et non pertinents par rapport au temps éducatif, ils contraignent trop les jeunes mineurs », a déclaré Sophie Legrand lors de la conférence de presse organisée par un collectif intersyndical.
 
Quant à l’article L. 521-14, il encadre le dessaisissement.
 
Durant la période de mise à l’épreuve éducative (sous-section 3), « le suivi du mineur au cours de la période de mise à l’épreuve éducative est placé sous le contrôle du juge des enfants » comme l’annonce l’article L. 521-15. Il peut donc prescrire, modifier ou lever la mesure à tout moment au cours de la mise à l’épreuve éducative (L. 521-17) et délivrer à l’encontre d’un mineur un mandat de comparution, d’amener ou d’arrêt (L. 521-18).
 
L’article L. 521-16 prévoit que la juridiction statuant sur la culpabilité et donc, ordonnant l’ouverture d’une période de mise à l’épreuve éducative, peut imposer, outre une expertise médicale ou psychologique :
  • une mesure judiciaire d’investigation éducative ;
  • une mesure éducative judiciaire provisoire ;
  • un contrôle judiciaire ou une assignation à résidence avec surveillance électronique.
Pour la durée de ces mesures, elles « expirent à la date fixée par la décision et en tout état de cause lors du prononcé du jugement sur la sanction ».
 
« La période de mise à l’épreuve éducative peut être prolongée une seule fois, pour une durée maximum de trois mois, par le juge des enfants » prévoit l’article L. 521-21. Cette décision est une mesure d’administration judiciaire, non susceptible de recours.
 
Le juge des enfants peut aussi décider, d’office ou sur réquisitions du procureur de la République, de convoquer le mineur à une audience de prononcé de la sanction dans un délai minimum de dix jours avant le terme de la période de mise à l’épreuve éducative s’il ne respecte pas le contrôle judiciaire ou l’assignation à résidence avec surveillance électronique (L. 521-22). Il peut aussi convoquer le mineur à un débat contradictoire pour révoquer le contrôle judiciaire et le placer en détention provisoire. Si le mineur ou son avocat demande un délai pour préparer la défense, la prochaine audience ne peut avoir lieu dans un délai supérieur à quatre jours (L. 521-23). La détention provisoire du mineur ne peut excéder un mois (L. 521-24). Il peut à tout moment demander sa mise en liberté et le juge des enfants devra statuer dans un délai de cinq jours suivant la communication au procureur de la République.
 
L’audience de prononcé de la sanction (sous-section 4) « se déroule conformément aux dispositions du Code de procédure pénale. L’instruction à l’audience terminée, la partie civile est entendue en sa demande si elle ne l’a pas présentée lors de l’audience d’examen de la culpabilité. Si le procureur de la République assiste à l’audience, il prend ses réquisitions. Le mineur et son avocat et, s’il y a lieu, les personnes civilement responsables, présentent leur défense. Le mineur ou son avocat a toujours la parole en dernier. La juridiction statue sur la sanction et, le cas échéant, sur l’action civile » (L. 521-26).
 
Le juge peut aussi statuer en audience unique (sous-section 5) : « Par exception, si le juge des enfants ou le tribunal l’estime nécessaire et se considère suffisamment informé sur la personnalité du mineur, il peut, après débat contradictoire, décider de ne pas ouvrir une période de mise à l'épreuve éducative. Il statue lors d’une audience unique sur la culpabilité du mineur et prononce la sanction » (L. 521-28). Si la juridiction prononce une peine, il faut que le mineur ait déjà fait l’objet d’une mesure éducative, d’une mesure judiciaire d’investigation éducative, de sûreté, d’une déclaration de culpabilité ou d’une peine prononcée dans le cadre d’une autre procédure (L. 521-29).
 
La section 3 prévoit « la procédure devant le tribunal pour enfants saisis aux fins de jugement en audience unique ». L’article L 521-31 du projet dispose que « Le tribunal pour enfants saisis en application de l’alinéa 3 de l’article L. 422-4 peut, par décision motivée au regard de la personnalité et des perspectives d'évolution du mineur, se prononcer uniquement sur la culpabilité et ouvrir une période de mise à l’épreuve éducative. La décision mentionne les objectifs de la période de mise à l’épreuve éducative. Si le mineur comparait détenu, il est remis en liberté. Le tribunal pour enfants prononce le cas échéant une mesure éducative judiciaire provisoire, le contrôle judiciaire ou l'assignation à résidence avec surveillance électronique selon les modalités prévues aux articles L. 521-16 ».
 
Pour les jugements rendus pas la Cour d’assises des mineurs (chapitre II), l’article L. 522-1 prévoit que :
« Sous réserve des dispositions du présent code, lorsqu’elle est saisie par ordonnance de mise en accusation du juge d’instruction, la cour d’assises des mineurs procède conformément aux dispositions des articles 231 à 379-1 du Code de procédure pénale. Après l'interrogatoire des accusés, le président de la cour d'assises des mineurs peut, à tout moment, ordonner que l'accusé mineur se retire pendant tout ou partie de la suite des débats. Concernant l'accusé mineur, le président pose, à peine de nullité, les deux questions suivantes :
1° Y a-t-il lieu d'appliquer à l'accusé une condamnation pénale ?
2° Y a-t-il lieu d'exclure l'accusé du bénéfice de l’atténuation de peine prévue aux articles L. 121-5 et L. 121-6 ? ».
 
Voies de recours – Les mineurs peuvent contester les décisions rendues à leur encontre grâce aux voies de recours (Titre III).
 
Pour les appels contre des décisions des juridictions de jugement et des décisions prises au cours de la période de mise à l’épreuve éducative (chapitre 1er),
Il est possible de faire appel des jugements rendus à l’encontre d’un mineur par le tribunal de police, le juge des enfants et le tribunal pour enfants devant la chambre spéciale des mineurs de la cour d’appel (L. 531-1). « Il peut être interjeté appel de la décision sur la culpabilité et de la décision sur la sanction dans les délais et selon les modalités prévues par le Code de procédure pénale » (L. 531-3).
 
Les appels des décisions de placement sous contrôle judiciaire, détention provisoire ou sous assignation à résidence avec surveillance électronique seront examinés par la chambre des mineurs « dans les délais et selon les modalités prévues devant la chambre de l’instruction par les articles 194 et 199 du Code de procédure pénale » (L. 531-4).
 
Concernant le défaut et l’opposition (Chapitre II) ;
« Les règles relatives au défaut et à l’opposition mentionnées aux articles 544 et 545 du Code de procédure pénale sont applicables aux jugements du tribunal de police prononcés à l’égard d’un mineur. Celles mentionnées aux articles 487 à 494-1 du Code de procédure pénale sont applicables aux jugements du juge des enfants et du tribunal pour enfants. Toutefois, dans le cas d’une opposition formée à une décision prononcée par le juge des enfants ou le tribunal pour enfants à l’audience d’examen de la culpabilité, la juridiction de jugement statue de nouveau dans les deux mois de l’opposition » (L. 532-1).



 
Source : Actualités du droit